René Maran : En ce jour, souvenons-nous de la naissance de l’auteur qui a osé dénoncer le colonialisme
René Maran, une figure emblématique des lettres françaises, reste un pionnier de la littérature noire et un fervent critique du colonialisme. Né le 5 novembre 1887 à bord d’un navire entre la Guyane et la Martinique, ce fils d’administrateur colonial a su, malgré son parcours au sein de l’administration coloniale, se dresser contre les injustices de son époque à travers sa plume incisive et humaniste.
À sept ans, René est envoyé dans des écoles prestigieuses de Bordeaux, où il se lie d’amitié avec Félix Eboué, futur gouverneur et défenseur de l’émancipation africaine. Dès 1912, Maran, devenu administrateur colonial, est envoyé en Oubangui-Chari (aujourd’hui République centrafricaine). Mais son passage dans cette fonction n’a fait qu’aiguiser sa sensibilité aux excès de la colonisation, une réalité qu’il dénonce avec force dans ses écrits.
En 1921, la publication de Batouala – Véritable roman nègre, œuvre marquante qui s’ouvre sur une préface audacieuse dénonçant les violences du colonialisme, lui vaut le prix Goncourt. Il devient alors le premier écrivain noir à recevoir cette prestigieuse récompense, un fait inédit qui fait grand bruit dans la France de l’époque. Ce roman, raconté du point de vue des colonisés, est une immersion brute dans les réalités des peuples africains sous la domination française et une critique lucide de l’oppression coloniale. Ce succès littéraire incite Maran à quitter l’administration pour se consacrer à la littérature et au journalisme à Paris.
Tout au long de sa carrière, il publie une multitude d’œuvres allant de la poésie à l’essai historique, enrichissant la littérature française de perspectives inédites sur la condition noire et l’héritage colonial. Parmi ses livres les plus célèbres, on trouve Le Petit Roi de Chimérie (1924), Djouma, chien de Brousse (1927), et Les Pionniers de l’Empire (1943), qui abordent les relations complexes entre colonisateurs et colonisés. Son œuvre témoigne de son engagement pour une représentation authentique des sociétés africaines et un hommage aux explorateurs africains et leurs récits souvent méconnus.
René Maran s’éteint le 9 mai 1960 et repose au cimetière Montparnasse à Paris. À travers son héritage littéraire, il demeure un symbole de résistance culturelle et de lucidité face aux dérives de la colonisation. Son œuvre résonne encore aujourd’hui comme un appel à la justice, à la dignité et à la reconnaissance de toutes les voix de la francophonie, en particulier celles de ceux que l’histoire a trop souvent réduits au silence.
Mamadouba CAMARA