Les victimes et les parents des victimes peuvent désormais espérer obtenir justice concernant la bousculade qui s’est produite le 1ᵉʳ décembre 2024 au stade du 3 avril.
En effet, le collectif des avocats des victimes du 1ᵉʳ décembre a décidé, ce 10 mars 2025, à travers quelques-uns de ses membres, de déposer plainte contre des personnes bien identifiées, susceptibles d’être coupables de l’incident qui s’est produit au stade du 3 avril, ayant causé plusieurs morts et des blessés graves.

Prenant la parole devant le tribunal de première instance de N’Zérékoré et un parterre de journalistes, maître Paul Lajar BILIMOU, avocat au barreau de Guinée et membre du collectif des avocats des victimes du 1ᵉʳ décembre, a déclaré : « Nous sommes là aujourd’hui, 10 mars 2025, au tribunal de première instance de N’Zérékoré pour déposer, de façon régulière, une plainte au nom des victimes et des parents des victimes de l’un des drames du stade du 3 avril. Nous avons déposé une plainte en bonne et due forme contre des personnes bien nommées, bien identifiées et identifiables, afin que le parquet, qui est l’organe de poursuite, engage des actions judiciaires contre elles et que justice soit rendue conformément à la loi. »
Parlant du parquet, maître BILIMOU estime que celui-ci est resté inactif : « Ce qui nous a poussés à porter plainte, c’est que nous estimons que le parquet reste inactif. Aucune des victimes présentes à N’Zérékoré n’a jamais reçu une seule convocation, que ce soit du parquet ou d’un organe d’enquête, pour être auditionnée sur ce qui s’est passé. Aucun témoin n’a jamais été convoqué ou invité à déposer son témoignage. Nous estimons que, puisque le parquet ne veut pas agir, nous allons le contraindre à le faire. S’il ne le fait pas, l’histoire retiendra au moins que des avocats ont déposé plainte de façon régulière. »
Interrogé sur la suite de l’enquête engagée par les autorités, il répond : « Nous avons tous appris que l’État a ouvert une enquête. Le Garde des Sceaux a pris la parole, donné des instructions au procureur général qui, d’après nos informations, aurait à son tour donné des directives au parquet d’instance, lequel nous informe qu’une enquête est ouverte. Mais nous ignorons qui la dirige. Nous ne savons pas devant quel juge d’instruction elle est pendante. Jusqu’à présent, nous avons frappé à plusieurs portes pour savoir si un cabinet a été saisi, sans réponse. C’est pourquoi nous avons pris nos responsabilités en déposant plainte contre ceux que nous supposons, de près ou de loin, impliqués dans ce drame. »
Maître Paul Lajar BILIMOU espère une suite à leur requête : « Nous reviendrons, aujourd’hui ou demain, pour voir quelle suite le parquet réserve à notre plainte. Deux possibilités s’offrent à lui : engager des poursuites ou classer notre procédure sans suite. Si la plainte est classée sans suite, nous en tirerons les conséquences. Pour l’heure, nous attendons la réaction du parquet. »

Quant à maître Théodore Michel LOUA, avocat du même collectif, il insiste sur l’importance de la justice pour tous : « Nous avons porté cette plainte non seulement pour que justice soit rendue aux victimes, mais aussi parce que la justice doit s’appliquer à tous, sans distinction. Une victime privée d’un proche essentiel – enfant, épouse, frère – doit pouvoir compter sur la justice. Or, la justice est la colonne vertébrale d’une nation. Si le chef de l’État a déclaré que la justice doit être la boussole qui guide chaque citoyen, il doit en faire son cheval de bataille pour que cette procédure aboutisse. Les Guinéens doivent pouvoir compter sur lui et savoir que la justice s’applique à tous. Il est essentiel de lui donner l’effectivité nécessaire pour garantir la paix et le développement. »
Selon maître Théodore, la plupart des victimes sont démoralisées : « La majorité des victimes sont démoralisées. C’est ce qui les a motivées à porter plainte. Aucun acte, ne serait-ce que symbolique, n’a été posé pour leur apporter un apaisement. Je ne parle pas des sacs de riz apportés par le président du CNT, mais au-delà de cela, un geste symbolique lors d’une immersion gouvernementale aurait dû être fait pour montrer que leurs préoccupations sont prises en compte et que leur douleur est partagée. Malheureusement, tout est passé inaperçu, comme si rien de grave ne s’était produit à N’Zérékoré. C’est d’ailleurs l’une des raisons fondamentales qui ont poussé ces victimes à porter plainte. »
Il convient de rappeler que ce drame reste le plus meurtrier de l’histoire du football dans la région forestière, ayant endeuillé de nombreuses familles.
Thierno Amadou DIALLO