Guinée-Bissau : Fernando Dias, caché depuis le putsch, accuse Embaló d’avoir fabriqué un “faux coup d’État” pour bloquer sa victoire
En Guinée-Bissau, la crise politique née du coup d’État militaire du 26 novembre continue de susciter de vives tensions. Au cœur de la tourmente, Fernando Dias, principal candidat de l’opposition, vit désormais dans la clandestinité. L’homme affirme craindre pour sa vie depuis que l’armée a renversé l’ordre institutionnel et désigné le général Horta N’Tam à la tête d’une transition politique de douze mois. Depuis sa cachette, Dias dénonce ce qu’il qualifie d’« opération orchestrée » par le président sortant Umaro Sissoco Embaló pour se maintenir au pouvoir.
Selon lui, le récit officiel du putsch ne tient pas. Fernando Dias assure que tous les acteurs militaires ayant participé à la prise du pouvoir sont des proches du président Embaló. Il évoque notamment le chef d’état-major particulier et le porte-parole de la présidence, qu’il considère comme des piliers de l’ancien pouvoir exécutif. Pour le candidat de l’opposition, la logique est simple : voyant sa défaite se profiler, Embaló aurait préféré remettre le pays entre les mains de ses alliés militaires plutôt que de reconnaître sa défaite.
Il affirme en outre que ses soutiens, notamment au sein du Parti africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap-Vert (PAIGC), l’avaient mis en position favorable dès le premier tour. La Commission électorale n’a pas proclamé les résultats, un blocage qui, selon lui, n’est pas le fruit du hasard. « Je suis le vainqueur de cette élection », martèle-t-il, reprochant au président sortant d’avoir tenté de manipuler les chiffres au niveau des commissions régionales et nationales. À l’écouter, la manœuvre aurait échoué, provoquant le recours à une mise en scène militaire.
Depuis sa cachette, Fernando Dias affirme être en sécurité mais reste convaincu que son arrestation était programmée. Il appelle désormais la CEDEAO, l’Union africaine et les Nations unies à garantir sa protection. Il dit redouter que la situation dégénère davantage si la communauté internationale ne réagit pas rapidement pour rétablir la légalité constitutionnelle. « Le pouvoir voulait m’arrêter à cause de ce faux coup d’État », déclare-t-il, dénonçant une stratégie visant à museler l’opposition et à prolonger le règne d’Embaló.
À l’annonce du général Horta N’Tam, désormais chef de la transition, le candidat ne mâche pas ses mots. Il lui demande de « permettre que le processus électoral soit terminé » et d’autoriser enfin la publication des résultats. Dias rappelle que la Guinée-Bissau est une démocratie et que le rôle de l’armée n’est pas de décider du futur président du pays. Il cite l’ancien chef de l’État José Mário Vaz, qui avait accepté sa défaite et transféré le pouvoir à Embaló sans résistance, comme un exemple de maturité politique que le pays doit retrouver.
Alors que la transition militaire se met en place, les Bissau-Guinéens attendent avec inquiétude la suite des événements. Entre suspicion de manipulation politique, tensions régionales et incertitudes électorales, l’avenir du pays demeure suspendu aux décisions d’une armée désormais au centre du jeu. Pour Fernando Dias, un seul chemin est acceptable : celui du respect des urnes.
Mamadouba CAMARA