Mali face aux blocus jihadistes : comment Bamako tente de desserrer l’étau sur son économie

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Depuis le mois de septembre 2025, le Mali traverse l’une des crises les plus sensibles de ces dernières années. Les jihadistes du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (Jnim), affilié à al-Qaïda, ont lancé une offensive silencieuse mais redoutablement efficace : étrangler l’économie en s’attaquant directement aux artères vitales du pays, notamment les convois transportant le carburant. Cette stratégie, pensée pour affaiblir l’État par l’intérieur, vise à créer une rupture entre le gouvernement de transition et la population, déjà fragilisée par des années d’instabilité.

Sur les axes qui relient la capitale aux régions, et même au-delà des frontières avec le Sénégal et la Côte d’Ivoire, les attaques se sont multipliées. Les camions transportant essence et gasoil sont devenus des cibles de premier plan. Les blocus imposés sur certaines localités ont paralysé les déplacements, renchéri les coûts de transport et provoqué une hausse soudaine du prix des produits de première nécessité. Cette pression constante a entretenu un climat d’angoisse et ouvert la voie à une campagne de désinformation orchestrée par les groupes jihadistes, laissant croire à un effondrement total de la capacité de l’État à fournir du carburant à sa population.

C’est dans ce contexte délicat que la Russie, partenaire sécuritaire privilégié de Bamako, a décidé de réaffirmer son engagement. Par la voix de sa porte-parole Maria Zakharova, Moscou a dénoncé des attaques « systématiques » visant à déstabiliser le pays. Elle souligne que ces opérations menées par le Jnim ne se limitent pas à une violence physique, mais s’accompagnent d’une guerre psychologique dont la finalité est de « semer le mécontentement » et de fragiliser davantage le gouvernement de transition.

Face à cette menace, le Corps africain du ministère russe de la Défense a été mobilisé. Les opérations engagées incluent des escortes terrestres et aériennes pour sécuriser les convois, des patrouilles le long des axes sensibles et des opérations de recherche pour traquer les groupes responsables des attaques. Selon Moscou, ces actions ont infligé « de lourdes pertes » aux groupes armés, permettant une relative accalmie dans la crise du carburant au cours des derniers jours.

Dans les rues de Bamako et des régions, ce léger répit s’est traduit par un retour progressif du carburant dans certaines stations, bien que la situation reste encore fragile. Pour les ménages et les transporteurs, chaque livraison représente un souffle d’espoir, même si la crainte d’une reprise des attaques plane toujours.

Au-delà de la logistique et de la sécurité, c’est la question de la résilience du Mali qui se pose. Le pays, engagé dans une transition politique sensible, doit désormais affronter une stratégie insidieuse visant à briser la confiance entre les institutions et les citoyens. La Russie affirme vouloir accompagner Bamako « sur la voie d’un développement indépendant et durable ». Mais sur le terrain, la capacité du gouvernement à stabiliser durablement son approvisionnement énergétique demeure au cœur de toutes les inquiétudes.

Alors que le pays tente de retrouver un équilibre, la population observe avec prudence les évolutions de cette crise qui révèle, une fois de plus, la vulnérabilité des infrastructures et la nécessité urgente de renforcer la sécurité des corridors économiques. Le Mali se trouve aujourd’hui à un tournant, entre volonté de résilience et pression continue des groupes armés, dans un contexte régional toujours instable.

Mamadouba CAMARA

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