Afrique de l’Ouest sous pression : l’alerte d’Omar Alieu Touray face à une menace terroriste en expansion
L’Afrique de l’Ouest se trouve aujourd’hui au cœur d’une inquiétude grandissante, mise en lumière par une prise de parole d’une rare fermeté. Le 18 novembre, devant les membres du Conseil de sécurité des Nations unies, le président de la Commission de la Cedeao, Omar Alieu Touray, a dressé un tableau sombre de la situation sécuritaire dans la région. Avec des mots pesés mais sans détour, il a averti que le terrorisme représente désormais « une menace existentielle » pour l’ensemble du bloc ouest-africain. Cette alerte, lancée depuis la tribune la plus influente en matière de sécurité mondiale, résonne comme un appel urgent à l’action collective.
Selon les données présentées, le Sahel central concentre à lui seul près de 80 % des attaques terroristes recensées en 2025, et plus de 85 % des victimes. Ces chiffres témoignent de la profondeur de la crise sécuritaire dans des pays comme le Mali, le Burkina Faso et le Niger, où les groupes jihadistes dictent leur loi sur de vastes territoires. Mais au-delà de ce foyer de violence désormais tristement connu, Omar Alieu Touray a insisté sur une réalité plus inquiétante : « aucune zone de la région n’est à l’abri ». Les systèmes d’alerte précoce de la Cedeao ont en effet relevé pour l’année 2025 près de 450 attaques, causant plus de 1 900 morts, preuve que la menace dépasse largement les frontières du Sahel.
L’évolution des stratégies des groupes extrémistes amplifie encore cette inquiétude. Le président de la Commission de la Cedeao a mis en avant ce qu’il qualifie de « guerre économique », une tactique désormais centrale dans les opérations de groupes jihadistes comme le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (Jnim). Depuis début septembre, cette organisation impose un blocus sévère dans le sud du Mali, entravant la circulation de carburant et paralysant de larges pans de l’économie locale. En s’attaquant ainsi aux infrastructures vitales, ces groupes ne se contentent plus de fragiliser les États : ils affaiblissent directement les populations, les administrations et les circuits commerciaux.
Cette transformation stratégique traduit une ambition claire : étendre l’instabilité, élargir leur influence et rendre les États ouest-africains encore plus vulnérables. Les répercussions touchent déjà les pays côtiers et les zones urbaines qui, jusqu’ici, se considéraient relativement à l’abri. La diffusion progressive de la violence montre que les frontières traditionnelles ne suffisent plus à isoler les foyers extrémistes.
L’alerte d’Omar Alieu Touray a été renforcée par l’intervention du président libérien Julius Maada Bio, actuel président de la Conférence des chefs d’État et de gouvernement de la Cedeao. Celui-ci a averti que, sans une action déterminée et coordonnée, le Sahel pourrait devenir « un sanctuaire permanent pour les enclaves extrémistes, à quelques heures seulement des grandes métropoles mondiales ». Cette projection, loin d’être une exagération, souligne l’urgence d’une réponse collective, robuste et durable.
Face à cette situation, les États de la région sont appelés à renforcer non seulement leurs capacités militaires, mais aussi leurs dispositifs de prévention, leurs politiques de développement et leur coopération transfrontalière. La lutte contre le terrorisme ne peut être gagnée que par une stratégie holistique, capable de s’attaquer simultanément aux causes économiques, sociales et politiques qui nourrissent l’extrémisme.
À l’heure où les menaces se multiplient et se transforment, l’Afrique de l’Ouest semble être arrivée à un tournant historique. Les messages lancés devant le Conseil de sécurité rappellent que le temps n’est plus aux demi-mesures, mais à une mobilisation urgente et collective pour éviter que la région ne bascule irrémédiablement dans l’instabilité.
Mamadouba CAMARA