Depuis son exil en Turquie, l’ancien président guinéen Alpha Condé a surpris l’opinion publique en lançant un appel au pardon pour les violences survenues durant ses onze années de pouvoir. Un geste qui se voulait symbolique et porteur d’apaisement, mais qui a immédiatement suscité colère et indignation chez les victimes de son régime. Pour elles, cette demande est non seulement tardive, mais aussi hypocrite et vide de toute portée réelle, faute d’un engagement clair envers la justice.
« Pas de pardon sans justice », martèle Mamadou Kissi Barry, président de l’Association des Victimes et Parents du Régime d’Alpha Condé (AVIPRAC). Pour lui, il est inconcevable d’envisager une réconciliation sans d’abord reconnaître les crimes commis, traduire leurs auteurs devant la justice et offrir réparation aux familles meurtries. « Le pardon ne saurait précéder la justice. C’est une condition indispensable pour guérir les blessures du passé », insiste-t-il.
Au-delà des déclarations, les plaies laissées par la décennie Condé restent encore vives. Répressions meurtrières de manifestations, arrestations arbitraires, disparitions forcées : les pages sombres de ce régime ne peuvent être tournées, selon les victimes, qu’à travers un processus de vérité et de justice.
Pour de nombreux observateurs, la réconciliation nationale ne se décrète pas dans un simple discours. Elle exige des actes concrets : ouverture d’enquêtes indépendantes, organisation de procès équitables, reconnaissance officielle des crimes et mise en place de réparations. Sans ces étapes, l’appel au pardon d’Alpha Condé apparaît davantage comme une manœuvre politique visant à redorer son image, plutôt qu’un geste sincère en faveur de la paix et de l’unité.
Mamadouba CAMARA