Un an après la disparition forcée du journaliste Habib Marouane Camara, la douleur demeure vive, intacte, presque insupportable. C’est une veillée de détresse et d’espoir qu’a partagée son épouse, Mariama Lamarana Diallo, ce 3 décembre 2025, lors d’une conférence de presse où les mots, lourds de chagrin, ont résonné comme un appel à la conscience nationale. Face aux confrères et acteurs de la société civile, la voix tremblante mais déterminée, elle a livré un témoignage qui rappelle l’urgence de la situation et l’ampleur de la souffrance qui déchire aujourd’hui sa famille.
Très éprouvée, elle a confié vivre une année marquée par l’incompréhension et le désarroi. « C’est une période très difficile pour moi, sa famille et vous en tant que confrères », a-t-elle déclaré, le regard chargé d’émotions. Dans sa parole, les interrogations incessantes des enfants, les nuits sans sommeil, les souvenirs qui s’éloignent et le silence qui pèse comme un bloc de pierre. L’aîné, malgré son jeune âge, semble déjà deviner l’ampleur du drame. « Il a fini par comprendre que son papa a été arrêté », confie-t-elle, décrivant un quotidien rythmé par la douleur psychologique et l’absence insupportable d’un père aimé.
La jeune mère évoque cette vie devenue un combat permanent : « Imaginez laisser un bébé nouveau-né à la maison et s’occuper d’un autre enfant en crise, l’envoyer vers une clinique en pleine nuit… » Dans sa voix perce à la fois la peine, la solitude et la force d’une femme qui refuse d’être brisée par l’épreuve.
Comme si cette détresse ne suffisait pas, Mariama Lamarana raconte subir depuis des semaines des appels anonymes, souvent passés au milieu de la nuit. Des actes qu’elle perçoit comme des tentatives d’intimidation destinées à la réduire au silence. « Le premier appel, c’était vers 3h30 du matin. J’ai décroché, la personne m’a demandé : “Allô, c’est madame Camara ?” Dès que j’ai demandé qui c’était, la ligne a été coupée », rapporte-t-elle calmement, bien que l’inquiétude transparaît clairement. D’autres appels, muets, revenant à des heures tardives, viennent ajouter à l’angoisse mais n’ébranlent pas sa détermination. « Si ces appels sont faits dans l’intention de m’intimider, c’est peine perdue. Je ne perds pas espoir, je vais continuer, je ne m’arrêterai pas tant que mon mari ne sera pas de retour. »
La famille de Habib Marouane Camara vit elle aussi dans une tourmente profonde. La mère du journaliste, raconte-t-elle, a perdu goût à la vie. Même devant une table garnie, elle n’arrive plus à se nourrir, rongée par le chagrin. Quant au père, âgé et malade, il endure cette absence avec une douleur silencieuse qui s’ajoute à sa fragilité. « Je ne sais pas où est Habib Marwan, par qui il est détenu, s’il est en vie ou s’il est mort », lâche-t-elle enfin, dans une phrase qui glace le cœur et résume toute l’ampleur du drame.
En cette date symbolique, à l’heure où la famille Marouane revit le cauchemar d’une année sans réponses, son épouse appelle une nouvelle fois à la vérité, à la justice et au respect de la dignité humaine. Son cri résonne bien au-delà d’une salle de conférence. C’est un appel destiné à toute une nation.
Mamadouba CAMARA