Guinée-Bissau : Une médiation sous tension alors que la Cédéao tente d’apaiser la crise politique

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Six jours après la prise de pouvoir par le Haut Commandement militaire en Guinée-Bissau, la capitale Bissau a vécu une journée décisive. Ce lundi 1er décembre, une mission de haut niveau de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) est arrivée pour ouvrir un dialogue direct avec les autorités de transition. Une visite très attendue dans un climat chargé d’incertitudes, marqué par des absences diplomatiques qui ont suscité de nombreuses interrogations.

Dès son arrivée, la délégation a été accueillie dans un contexte tendu, révélateur de la fragilité politique actuelle. Le général Horta N’Tam, président de transition, a conduit la rencontre avec les émissaires de la Cédéao dans le bâtiment principal attenant au palais présidentiel. Une réunion strictement à huis clos, où journalistes et observateurs ont été priés de quitter les lieux pour ne revenir qu’à la fin des discussions. Ce huis clos, long de près de trois heures, a renforcé l’impression que les échanges concernaient des points sensibles, cruciaux pour la stabilité du pays.

La mission de la Cédéao était composée de personnalités de premier plan, dont le président sierra-léonais Julius Maada Bio, actuellement à la tête de l’organisation, accompagné du Représentant spécial des Nations unies pour l’Afrique de l’Ouest, Leonardo Simão, et du président de la Commission de la Cédéao, Omar Aliou Touré. Leur présence affichait clairement la volonté régionale d’obtenir des garanties de la junte militaire, dans un pays déjà marqué par plusieurs épisodes institutionnels houleux au cours des dernières années.

Cependant, l’attention s’est rapidement tournée vers ceux qui n’étaient pas là. L’absence remarquée du Sénégal, du Togo et du Cap-Vert, dont les chefs d’État étaient initialement attendus, a suscité une vague de commentaires. C’est surtout l’absence du président capverdien, José Maria Neves, qui a retenu les regards. Dans une déclaration brève mais lourde de sens, il a expliqué s’être retiré de la mission « en raison des relations historiques qui unissent les deux pays », invoquant également des impératifs de cohérence et d’efficacité, sans dévoiler davantage ses motivations. À Bissau, cette absence a provoqué une déception palpable, le Cap-Vert étant perçu comme un « pays frère », souvent considéré comme un acteur modérateur dans les crises régionales.

Malgré ces tensions diplomatiques, les deux parties ont qualifié leurs échanges de « fructueux » lors du point de presse final. Aucun détail majeur n’a filtré, mais l’annonce d’un geste fort du Nigeria est venue bouleverser les équilibres : Abuja a accepté d’accorder l’asile politique à l’opposant Fernando Dias, figure clé de la contestation en Guinée-Bissau. Une décision interprétée par certains comme une protection politique, et par d’autres comme une pression indirecte sur la junte.

Dans une capitale encore sous choc institutionnel, cette journée de médiation ouvre une nouvelle phase d’incertitude. Si la Cédéao affirme avoir posé les bases d’un dialogue constructif, le pays attend désormais des signes concrets de détente. Entre espoir, prudence et inquiétude, Bissau se prépare à vivre les prochains jours comme une étape décisive pour son avenir politique.

Mamadouba CAMARA

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