Guinée-Bissau : le général Horta N’Tam prend les rênes de la transition après un coup d’État fulgurant
La Guinée-Bissau vient d’entrer dans une nouvelle page de son histoire politique, une page marquée par le fracas des armes et la montée d’un nouveau pouvoir militaire. Moins de vingt-quatre heures après le coup d’État qui a secoué Bissau ce mercredi, le général Horta N’Tam a été officiellement investi, ce jeudi 27 novembre 2025, président de la transition et chef du Haut commandement militaire pour la restauration de l’ordre.
Une annonce qui scelle la prise de contrôle totale des forces armées dans un pays habitué aux soubresauts politiques mais rarement à une transition aussi rapide.
Chef d’État-major général de l’armée de terre jusqu’à sa désignation, Horta N’Tam est une figure bien connue de l’appareil sécuritaire. Proche du président déchu Umaro Sissoco Embaló, il a longtemps été perçu comme l’un de ses hommes de confiance. Pourtant, le renversement du chef de l’État et l’arrivée à la tête du pays de l’un de ses anciens alliés témoignent d’une dynamique complexe au sein des forces armées, où loyautés affichées et réalités stratégiques ne coïncident pas toujours.
Dans son premier message à la nation, diffusé sur la télévision publique, le général Horta N’Tam a justifié sa prise de pouvoir par la nécessité de « restaurer l’ordre, garantir la stabilité et préserver l’unité nationale ». D’un ton ferme mais mesuré, il a assuré que la transition ne durerait pas plus d’un an, le temps, selon lui, de remettre le pays sur les rails institutionnels et d’organiser des élections « libres et transparentes ».
Il a également promis de lutter contre la corruption, qu’il qualifie de « cancer national », et de renforcer la discipline au sein de l’administration publique.
Pour de nombreux observateurs, cette transition militaire soulève cependant autant de questions qu’elle apporte d’annonces. Le rôle de l’armée dans la vie politique bissau-guinéenne reste un sujet récurrent, tant ce pays a connu au cours des dernières décennies une série de putschs, tentatives de coup d’État et luttes internes entre factions militaires.
Le fait que le nouvel homme fort soit un proche de l’ancien président déchu apporte une dose supplémentaire de complexité dans l’analyse des événements, certains y voyant une recomposition interne plutôt qu’une rupture totale.
Dans les rues de Bissau, l’atmosphère restait tendue ce jeudi. Si plusieurs quartiers ont retrouvé un calme relatif, les populations demeurent prudentes, oscillant entre inquiétude et espoir. Certains habitants se disent soulagés par la fin des affrontements et espèrent une transition apaisée. D’autres, plus sceptiques, redoutent un cycle de pouvoir militaire prolongé, comme cela a souvent été observé ailleurs dans la sous-région.
Sur le plan régional, les réactions ne se sont pas fait attendre. Plusieurs capitales ouest-africaines suivent la situation de près, conscientes des implications sécuritaires et politiques qu’un nouvel épisode d’instabilité en Guinée-Bissau pourrait entraîner. Si des condamnations officielles sont attendues dans les heures qui suivent, l’enjeu pour la CEDEAO et l’Union africaine sera de trouver un équilibre entre pression diplomatique, exigence de retour à l’ordre constitutionnel et nécessité de préserver la stabilité d’un pays stratégique.
La Guinée-Bissau s’engage donc dans une transition dont l’issue reste incertaine. Le général Horta N’Tam, désormais au sommet de l’État, porte la responsabilité lourde de restaurer la confiance, ramener la sécurité et préparer un horizon politique crédible. Pour un pays habitué aux crises politiques mais riche d’un potentiel immense, l’année qui s’ouvre sera décisive.
Reste à savoir si cette nouvelle transition parviendra à ouvrir la voie à une stabilité durable ou si elle ne sera qu’un épisode de plus dans un cycle désormais bien trop familier.
Mamadouba CAMARA